- Goopilation propose la traduction de la réponse officielle de Google (via Google Lat Long); Google reconnait ses erreurs et s'appuie sur une démonstration historique pour justifier leurs changements de frontière: "ne version corrigée suivra la rive est de la rivière San Juan vers le nord, presque jusqu’aux Caraïbes. Elle tournera alors vers l’est, longeant le rivage sud d’un large lagon, Laguna los Portillos. Cette représentation suit la démarcation définie par le Premier Accord d’Arbitrage de 1897, qui affirmait le traité de Cañas-Jerez de 1858.En 1888, le Président des Etats-Unis Grover Cleveland fut sollicité par le Nicaragua et le Costa Rica pour arbitrer le conflit. Cette année là, le New York Times publia la décision du Président Cleveland. L’Arbitrage de 1888 confirmait le traité de 1858 et ses termes. Puis, en 1897, Cleveland envoya Edward P. Alexander réaliser un Accord d’Arbitrage plus détaillé pour cette région. Alexander détailla particulièrement la frontière de la rivière San Juan et dessina la carte ci-dessous :
L'attitude de Google est intéressante; la société de MontainView semble assez ennuyée par cette affaire: "Notre but est de fournir les cartes les plus précises et récentes possibles. Les cartes sont créées à l’aide d’une grande variété de sources de données, et il y aura inévitablement des erreurs dans ces données. Nous travaillons dur pour corriger toutes les erreurs dès que nous les découvrons." [...] "La cartographie est une entreprise complexe, et les frontières changent sans cesse. Nous nous engageons toujours à mettre à jour nos cartes dès qu’il le faudra". Google ainsi développe deux arguments liés: la complexité des données et leurs croisements engendrent des erreurs, surtout dans une gestion globalisée des données cartographiques. Enfin, il montre aussi la difficulté à mettre à jour les dalles de Google Maps et Earth: Google travaille avec des services de données; Ces outils sont des visualisateurs dépendants de sociétés commerciales. Du coup, ces erreurs sont moins visibles dans un projet de cartographie en ligne comme OpenStreetMap:
- Ogle Earth propose une analyse très fouillée de l'incident et précise également la frontière vue dans Bing Maps: il montre qu'en grandissant l'échelle, on se rend compte aussi que la frontière n'est pas tout à fait juste; elle ne suit pas exactement le cours du San Juan (approximation d'une dizaine de kilomètres). C'est un cas particulier où le changement d'échelle offre des visées différentes. Avec plus de recul, la frontière paraît exacte, et plus on "zoome", plus on se rend compte que l'implantation de la frontière est...inexacte...
Une belle démonstration du caractère inexact, voir subjectif de la cartographie, y compris au niveau des fournisseurs de données. Autre impact: quelle aurait été l'attitude du Nicaragua, si Bing Maps avait été pris comme cartographie de référence ? Les armées auraient envahies une bande de 10 km ?
- La réponse du Nicaragua ne s'est pas fait attendre: sur le site InsideCostaRica, on découvre que les dirigeants du Nicaragua ont adressé une lettre à google mise à la disposition de la presse où ils demandent de ne pas changer les frontières; pour justifier cette demande, il s'appuie sur les déclarations de Alejandro Rodriguez, directeur général de l'Institut nicaraguayen des études territoriales (INET), en charge des cartes officielles du Nicaragua.
- Google montre ses limites à intégrer des données dont elle n'est pas le dépositaire; elles interrogent donc sur la construction des données cartographiques proposées dans les géoportails et les globes virtuels
- Elles rappellent à quel point la cartographie et le tracé des frontières sont des arts subjectifs, fonction d'argumentaire et de consensus entre les états.
- Comme le titre le petit blog cartographique: "La cartographie sert toujours à faire la guerre"